Serious Game

1.1. Introduction sur les Serious Game

L’industrie vidéo-ludique a réellement pris son envol au début des années 80 avec, par exemple, la popularisation du célèbre jeu Pong. Bien qu’encore fébrile aux Etats-Unis, le jeu vidéo migre au Japon. On voit alors apparaitre quelques éditeurs sur le marché dont Nintendo. D’année en année, les jeux vidéo deviennent de plus en plus accessibles au grand public et s’encrent donc de plus en plus dans notre société.

Les « jeux sérieux », ou « Serious Game », s’inscrivent dans cette lignée. Ils s’appuient sur les progrès des jeux vidéo mais tentent d’offrir, en plus de l’expérience ludique, un message. En général, le budget alloué à ces Serious Game est peu élevé par rapport aux jeux vidéo standards, ce qui explique le rendu graphique de ceux-ci.

Le Serious Game le plus connu à l’heure actuelle est America’s Army, jeu développé pour le secteur de la défense aux Etats-Unis. Celui-ci a pour vocation de redorer le blason de l’armée américaine et ainsi attirer le jeune public.

1.2. Définition

« La vocation d'un Serious Game est d'inviter l'utilisateur à interagir avec une application informatique dont l'intention est de combiner à la fois des aspects d'enseignement, d'apprentissage, d'entraînement, de communication ou d'information, avec des ressorts ludiques issus du jeu vidéo. […] Pour opérer cette mise en relation entre l'aspect utilitaire et le jeu vidéo, le concepteur va mettre en relation deux types de scénarii : le premier sera d'ordre utilitaire, le second sera d'ordre purement ludique » (définition de Laurent MICHAUD – Document IDATE).

Scénario utilitaire + scénario vidéo-ludique = serious game

1.3. Type de Serious Game

On distingue trois grands types de Serious Game :

1.3.1. Les Serious Game à message

Ceux-ci peuvent être classés en plusieurs sous-catégories :

1.3.2. Les Serious Game d’entrainement

Cette catégorie regroupe les serious game simulant un système avec lequel les utilisateurs sont invités à atteindre un objectif précis pour être évalués. L'idée ést de conduire les utilisateurs à affiner leur savoir-faire sur un plan psychomoteur ou purement cognitif.

Ces Serious Game sont souvent présents dans le secteur de l’éducation et de la santé. On peut citer dans le domaine de la santé le Serious Game Pulse qui propose de diagnostiquer des patients et de leur administrer les soins les plus adaptés.

1.3.3. Les Serious Game de simulation

Cette dernière catégorie recense les serious game dont la base vidéo-ludique est dénuée d'objectif final visant à évaluer les utilisateurs. Seul l'univers proposé ou le système simulé par l'application et la manière d'y interagir fixent un cadre.

On peut citer September the 12th qui met en scène une ville du Moyen-Orient infestée de terroristes. L’utilisateur a le choix entre lancer des missiles ou ne rien faire. Sachant que lorsqu’un utilisateur lance un missile, celui-ci ne détruit pas entièrement sa cible et cause la mort de certains civiles qui, rongés par la haine, deviendront eux aussi des terroristes. Le message que veut faire passer ce jeu est que la violence engendre la violence.

1.4. Secteurs d’application

Nous avons déjà commencé à introduire quelques domaines d’applications dans les paragraphes précédents. Nous en avons recensé six :

Secteur de la Défense

Sans équivoque possible, c’est le secteur le plus développé et plus particulièrement aux Etats-Unis où l'on observe une forte corrélation entre l’armée et les Serious Game. Comme dit précédemment, on peut citer America’s Army mais aussi des jeux plus connus tel que Flight Simulator.

Secteur de la formation et de l’enseignement

Ce secteur est en pleine expansion depuis quelques années. Les Serious se présentent clairement comme l’évolution des solutions E-Learning d’aujourd’hui, d’ailleurs une étude faite par l’IDC : « En 2008, le serious game était d’ailleurs utilisé dans 40% du marché du e-learning. » (http://www.seriousgaming.fr/definition-serious-game/)

Secteur de la publicité

Les serious games dédiés à la publicité offrent la particularité d'exposer sur toute la durée d'une partie vidéo-ludique l'utilisateur à une marque ou un produit.

Secteur de l’information et de la communication

Dans ce cadre, les Serious Games véhiculent des messages dans divers domaines. On peut citer Interactive Night Out (http://willinteractive.com/products/interactive-nights-out-1) qui traite le problème des MST (domaine de la santé). Ce secteur est souvent couplé à celui de la publicité. Les Serious Game dans ce secteur sont largement minoritaires par rapport à ceux de la défense et de l’éducation.

Secteur de la santé

Les serious games dédiés au secteur de la santé ont pour vocation d'améliorer les capacités mentales et physiques des utilisateurs.

Dans ce secteur, on retrouve tous les programmes d’entrainement conçus sur la console Wii et Ds de Nintendo. Ce marché prend de l’ampleur : en 2007, ce marché représentait 225 millions de dollars seulement sur le sol américain.

Il apparait que ce secteur a un grand potentiel. De nombreux acteurs tels que Ben Sawyer disent que ce secteur pourrait bien avoir une forte croissance.

Secteur de la culture

Ce secteur est très minoritaire. Il est souvent question de tourisme : capter plus de public dans les musées, visites de lieux touristiques en 3D, etc.

Ces Serious Game peuvent permettre, par exemple, de visiter des lieux hostiles (nucléaires,…) ou fragiles (écosystème, monuments anciens,…) dont l’accès serait normalement très restreint.

1.5. Cibles visées par le serious game

Dans cette partie, il est question de savoir a qui est adressé un Serious Game. Les cibles peuvent être de deux sortes : les utilisateurs et les commanditaires.

1.5.1. Les utilisateurs potentiels

Les Serious Game étant une sorte de jeux vidéo, une première estimation des utilisateurs potentiels serait de découper la population adonnée aux jeux vidéo par tranche d’âge, comme le montre la figure ci-dessous. La moyenne d’âge est de 25 ans.

Répartition

Moins de 15 ans

« Dès 4 à 5 ans, les enfants sont capables d'identifier si les applications offrent un véritable gameplay ou simplement un habillage ludique de façade. Dès 5 à 6 ans, certains enfants sont à même de recopier dans un navigateur Internet des URL de sites de jeux vus dans des émissions télévisées ou sur support papier. Dès 6 à 7 ans, des enfants se déplacent finement dans des environnements en 3D temps réel. […] En dessous de 9-10 ans, cependant, les enfants ont bien souvent besoin de la présence d'une personne plus âgée pour assurer la maintenance technique le cas échéant. »

Pour les Serious Game, un enfant de cet âge se délaissera assez rapidement du contenu si celui-ci n’est pas encadré ou que le contenu n’est pas assez attractif. La présence d’un adulte est donc requise.

De 15 à 24 ans

Le public de cette tranche d’âge est plus exigent sur la qualité du graphique et du gameplay. Or les budgets alloués aux Serious Game sont généralement nettement inférieurs aux jeux vidéo de renom. Le contenu utilitaire d’un Serious Game peut aussi être un frein car il y a des chances pour que celui-ci rime avec effort. Pour passer outre cette barrière, il faut que le Serious Game soit utilisé dans un contexte approprié. Par exemple, dans une école pour une formation, l’aspect nouveau et dynamique par rapport à des cours normaux rendront son emploi beaucoup plus attractif. Pour palier le problème de budget, il peut être intéressant de faire des Serious Game à l’image des casual games car ceux-ci touchent et ont un grand succès auprès de gens de tout âges. De plus, leur conception ne demande pas un grand budget.

Plus de 24 ans

Pour les plus de 24 ans et jusqu’à 55 ans environ, le temps consacré à la pratique du jeu vidéo diminue en fonction de l’âge. Cette diminution peut s’expliquer par des obligations professionnelles et familiales qui n’existent pas chez les moins de 24 ans. De plus la génération des au-delà de 35 ans n’ont pas connus l’effervescence des jeux vidéos dans leurs enfances, ils ne retrouvent donc pas le même intérêt. En revanche, on observe que les personnes de plus de 55 ans se familiarisent de plus en plus avec la technologie, dû à leur nouveau temps libre (retraite…). On retrouve donc de plus en plus de senior à jouer à des jeux de type casual game.

Des sociétés telles que Némopolis ont déjà pris en compte de tels paramètres et vendent des edugames historiques avec un livre associé pour que des liens intergénérationnels puissent s'établir : les grands-parents lisent le livre, les enfants utilisent le cédérom.

Nintendo, quant à eux, grâce à la Wii ou encore grâce à la DS, propose de plus en plus de titre accessible tout public sur les thèmes de la santé et du bien être (Entrainement cérébral Dr. Kawashima, Wii Fit, etc.)

A noter que le concours Lépine 2008 a récompensé un ordinateur possédant une interface simplifiée et étudiée pour les personnes âgées (http://www.zdnet.fr/actualites/informatique/0,39040745,39380956,00.htm)

1.5.2. Les commanditaires

La défense

C’est le plus gros commanditaire actuel (en particulier aux Etats-Unis). C'est le pionnier du domaine, celui qui finance les plus importantes productions à l'instar d'America's Army. De plus, elle ne soutient pas que les Serious Game à vocation militaire, on peut par exemple citer Pulse!. La défense étatsunienne finance aussi certains serious game d'entraînement médical sous forme de bourse fédérale à hauteur de 7 millions d’euros. A noter aussi que la NSA a également commandité son propre Serious Game, Ground Truth, dont l’objectif est d'informer le public sur la manière de réagir face à des catastrophes naturelles ou des attaques terroristes.

En France, l’acteur majoritaire est aussi la Défense, mais dans des proportions plus réduites. Par exemple, elle a fait appel à la société Paraschool (groupe Editis) pour réaliser son propre Serious Game, Mission Défense. L’objectif de celui-ci est de sensibiliser les collégiens aux différents types de missions qu’effectue l’armée française.

Les entreprises et autres institutions privées

Pour les entreprises et institutions privées, on peut séparer les Serious Game en deux registres : la communication et la formation professionnelle. Pour la communication, comme nous l’avons dit précédemment, cela passe par la commande de Serious Game de type advertgame. Pour les Serious Game de formation professionnelle (domaine spécialisé), les entreprises font en général appel à des sociétés ou éditeurs spécialisés.

Les institutions publiques

Celles-ci commandent essentiellement des Serious Game à message ou d’entrainement. Des études sont actuellement en cours sur les bienfaits des Serious Game dans les cursus scolaires.

Les éditeurs

Les éditeurs font aussi partis des commanditaires, qu’ils fassent parti du monde du jeu vidéo, du ludo-éducatif ou autres. Tout comme beaucoup de métiers, il est parfois préférable de sous-traiter une partie où l’éditeur n’est pas expert.

1.6. Modèle économique

Il existe trois types de segments dans l’industrie du Serious Game :

1.6.1. Le segment B2B

Dans ce segment, trois modèles en découlent :

Modèle par commande

Il repose sur une demande formulée moyennant finance par un commanditaire auprès d’un prestataire représenté par toute entité, à l’exception d’un particulier, qui soit à même de concevoir et de développer un Serious Game. Ce dernier se destine à l’usage du seul commanditaire.

Modèle par vente de License

Il repose sur la mise à disposition moyennant finance d’une application produite par un éditeur, une société, un indépendant, une association ou une institution publique ou privée auprès de toute entité, à l’exception d’un particulier. L’application est ici, soit un Serious Game prêt à l’emploi – personnalisable ou non –, soit un logiciel de création permettant de générer un Serious Game, soit encore un Serious Game intégré au sein d’une application ou un produit tiers.

Modèle formation / consulting

Il se base sur le service qui consiste à former les concepteurs et les développeurs d’une institution publique ou privée aux approches du Serious gaming, in situ, durant les différentes phases de production de l’application.

1.6.2. Le segment B2C

Le modèle éditeur/ développeur repose sur l’initiative d’un éditeur, d’une société, d’un indépendant, d’une association ou d’une institution publique ou privée, qui va concevoir, développer et proposer directement à la vente, sans demande ou commande préalable, un Serious Game prêt à l’emploi – personnalisable ou non – auprès de tous types de consommateurs.

1.6.3. Le segment B2B2C

On retrouve ici les trois modèles économiques du B2B. La différence étant que le commanditaire joue ici le rôle d’un intermédiaire entre le développeur et le consommateur du Serious Game.

1.7. Les serious Game : technologies clés des prochaines années

Un rapport du ministère de l’industrie classe les serious game comme une technologie qui va évoluer dans les prochaines années.

La réalité augmentée est un cas particulier de réalité virtuelle consistant à superposer un « monde virtuel » au monde réel, généralement pour servir un objectif particulier tel que la visualisation d'informations.

Ces trois domaines exploitent les technologies informatiques et les interfaces matérielles, en particulier :

Les deux problèmes majeurs de la réalité virtuelle sont la création du monde virtuel et l'interfaçage entre le sujet et le monde virtuel. Les difficultés rencontrées sont de trois ordres :

Degré de développement :
Emergence Croissance Maturité

Un secteur en croissance qui n’a pas encore atteint sa maturité et qui devrait offrir de nouveaux Marché.

Le marché des Applications de réalité augmenté comme les Serious Game

Degré de diffusion de la technologie :
Naissance Diffusion Généralisation

Compétences technologiques : audiovisuel, télécommunications, informatique, semi-conducteurs, optique.

Pôles de compétitivité : Image, multimédia et vie numérique (Île-de-France), Images et réseaux (Bretagne), Loisirs numériques (Rhône-Alpes), System@tic (Île de France), Elopsys (Limousin, Midi-Pyrénées)

Liens avec (technologies) : processeurs et systèmes ; composants logiciels ; acquisition et traitement de données ; gestion et diffusion des contenus numériques ; modélisation, simulation, calcul ; interfaces humain-machine ; affichage nomade ; capteurs intelligents et traitement du signal, méthodes et outils de conception ; imagerie et instrumentation associées aux sciences du vivant.

Principaux acteurs français

Centres de compétences : Irisa (Rennes), CEA, INT-Artemis (Paris), BRGM, Clarte (Laval)

Industriels : Dassault Systèmes, EDF, PSA, Renault, EADS, Institut Français du Pétrole, CS Communication & Systems, France Télécom, Thales, Sell (Syndicat des editeurs de logiciels de loisirs), Mercury Computer Systems (ex-TGS), RATP, Haption, Simteam

Exemples d'acteurs dans le monde : MIT Medialab (États-Unis), Silicon Graphics (États-Unis), Alias (Canada), Projet IST Olga