Partie Legislative

 

Un cadre de loi limité

Une directive CADRE hors de portée

Contexte législatif europeen dans le domaine de l'eau

Depuis les années 1970, la politique publique de l’eau s’inscrit dans un cadre européen. La qualité de l’eau a toujours été une préoccupation dans la politique de l’Union Européenne. La législation communautaire s’est d’abord intéressée aux usages de l’eau (eau potable, baignade, pisciculture, conchyliculture), puis à la réduction des pollutions (eaux usées, nitrates d’origine agricole). La législation européenne comprend environ une trentaine de directives sur l’eau

L’approche européenne est indispensable pour la gestion des cours d’eau qui traversent plusieurs pays (comme le Rhin, la Meuse, la Sambre, l’Escaut et le Rhône). Elle s’applique aussi à la protection des mers, à travers des conventions internationales, que l’Union Européenne a signées, parmi lesquelles :

• Les conventions d’Oslo et de Paris (1974 et 1978) sur la protection du Nord-est Atlantique ;

• La convention de Barcelone (1976) sur la conservation de la Méditerranée.

La Directive Cadre sur l’Eau (DCE) du 23 octobre 2000 vise à donner une cohérence à l’ensemble de la législation avec une politique communautaire globale dans le domaine de l’eau. Elle définit un cadre pour la gestion et la protection des eaux par grand bassin hydrographique au plan européen avec une perspective de développement durable.

Pouquoi a-t-on crée la D.C.E

A l’échelle mondiale, l’eau potable n’est pas répartie de manière égale entre tous les individus. La santé de l’Homme est menacée. Par ailleurs, l’eau rencontre de nombreux problèmes de gaspillage et de pollution mettant ainsi en danger la pérennité de la ressource.

En Europe, la qualité de l’eau s’est dégradée au cours de ces dernières années malgré les efforts de dépollution engagés. Ceci s’est accompagné d’une réduction de la biodiversité dans les milieux aquatiques

En France, les dégradations physiques apportées aux cours d’eau, avec la création de seuils et de barrages, la dérivation des eaux, le rééquilibrage et ainsi que les prélèvements d’eau ont entraîné un affaiblissement biologique de ces milieux aboutissant à une diminution de la qualité de l’eau.

Le parlement européen a réagi, en adoptant le 23 octobre 2000, la Directive Cadre sur l’Eau (DCE) (publiée en décembre 2000 au Journal Officiel des Communautés Européennes). Ce texte synthétise et simplifie toutes les directives concernant les eaux continentales et maritimes déjà mises en place, basées sur un système de gestion par bassin hydrographique.

Ce texte fixe des objectifs pour la préservation et la restauration de l’état des eaux superficielles (eaux douces et eaux côtières) et pour les eaux souterraines. L’objectif général est d’atteindre en 2015 le bon état des différents milieux sur tout le territoire européen.

Les grands principes de la DCE sont :

• Une gestion par bassin versant ;

• La fixation d’objectifs par « masse d’eau » ;

• Une planification et une programmation avec une méthode de travail spécifique et des échéances ;

• Une analyse économique des modalités de tarification de l’eau et une intégration des coûts environnementaux ;

• Une consultation du public dans le but de renforcer la transparence de la politique de l’eau.

Les grandes étapes prescrites par la D.C.E :

L’agenda de la DCE se résume dans les six étapes suivantes :

• 2006 - 2008 : Réalisation d’un projet de SDAGE qui a été soumis à la consultation du public ;

• Du 15 avril au 15 octobre 2008 : Consultation du public sur le projet de SDAGE et son programme de mesures ;

• Du 10 janvier au 10 mai 2009 : Consultation des Assemblées Locales sur le projet de SDAGE et son programme de mesures ;

• Fin 2009 : Adoption du SDAGE par le Comité de bassin puis approbation par le préfet coordonnateur de bassin ;

• 1er janvier 2010 : Application du SDAGE : Schéma Directeur d'Aménagement et de Gestion des Eaux ;

• 2015 : Compte rendu auprès de l’Europe sur l’atteinte des objectifs fixés

Calendrier de la D.C.E (source: WWW.EAU-POITOU-CHARENTES.ORG))

En 2009 : Désignation des Masses d’Eau Artificielles (MEA) et Fortement Modifiées (MEFM), qui doivent figurer dans le plan de gestion.

Etablissement des plans de gestion qui doivent définir les objectifs à atteindre en 2015 sur chaque bassin hydrographique.

Etablissement pour chaque bassin des programmes de mesures incitatives et réglementaires, c’est-à-dire les actions concrètes nécessaires à la réalisation des objectifs définis dans les plans de gestion, ainsi que leur zone d’application, leur date de mise en œuvre, leur coût, etc.

En 2015, compte rendu par chaque Etat membre auprès de l’Europe sur l’atteinte ou non des objectifs fixés dans les plans de gestion, et première analyse par la Commission Européenne de l’atteinte ou non des objectifs fixés dans ces documents. Etablissement pour chaque bassin d’un nouveau plan de gestion et d’un nouveau programme de mesures pour 6 ans, également soumis à consultation du public.


Le grenelle

Grenelle 1 :

Le Grenelle a définit pour le secteur de l’eau les objectifs suivants :

• Atteindre ou conserver, d’ici à 2015, le bon état écologique ou le bon potentiel pour l’ensemble des masses d’eau, tant continentales que marines ;

• Doubler la quantité de masses d’eau en bon état d’ici à 2015 ;

• Interdire l’utilisation des phosphates à compter de 2012 ;

• Définir, d’ici à 2012, des plans d’action pour protéger les 500 captages d’eau potable les plus menacés, en intégrant la problématique des produits phytosanitaires ;

• Donner la priorité aux agricultures biologiques et peu utilisatrices d’intrants dans les périmètres de captage d’eau potable ;

• Accélérer la mise aux normes des stations d’épuration ;

• Développer la récupération et la réutilisation des eaux pluviales et des eaux usées, dans le respect des contraintes sanitaires ;

• Fixer des objectifs de réduction de la présence des substances dangereuses prioritaires dans les milieux aquatiques ;

• Mettre à l’étude l’aménagement ou l’effacement des obstacles les plus problématiques pour la migration des poissons ;

• Renforcer la surveillance des milieux aquatiques et la mise à disposition du public des données environnementales.

D’autres importantes mesures ont été prises suite à cette loi :

• Fixer comme objectif à l’Etat de promouvoir les actions visant à limiter les prélèvements et les consommations d’eau ;

• Lancer une action spécifique pour généraliser la détection de fuites dans les réseaux et programmer les travaux nécessaires ;

• En mer, renforcer la lutte contre les dégazages, les déballastages et l'apparition d'espèces exotiques envahissantes, non seulement dans les zones portuaires, mais dans toutes les eaux en particulier les plus fragiles (les zones de protection écologique).

Grenelle 2 :

Elle s’inscrit dans le prolongement de la loi de programmation relative à la mise en œuvre du Grenelle de l’environnement (Grenelle 1), qui a déterminé les objectifs de l’Etat dans le domaine de l’environnement, le Grenelle 2 traduit en obligations, interdictions ou permissions les principes précédemment affirmés.


Une adaptation des lois

SDAGE : Schéma Directeur d'Aménagement et de Gestiondes Eaux

Les SDAGE sont des documents de planification des politiques de l’eau à l’échelle des grands bassins. Ils rassemblent et précisent les grandes orientations d’une gestion équilibrée et durable de la ressource en eau et des milieux aquatiques, telle que définie par le législateur de manière uniforme au plan national (Code de l’environnement, art. L. 211-1). Ils doivent théoriquement répondre aux dégradations constatées dans l’état des lieux de 2004, et comprendre des dispositions intéressant les domaines de l’eau potable, de l’assainissement, de l’agriculture, de l’entretien des cours d’eau.

Le SDAGE est doté d’une portée juridique : il est opposable à l’administration et ses décisions, dans le cadre d’un rapport de compatibilité, c’est-à-dire de cohérence ; il n’est pas opposable aux tiers. Une intervention individuelle contraire aux principes du SDAGE ne pourra donc pas être attaquée en soi ; seule la décision administrative ayant entraîné, permis ou autorisé cette intervention pourra être contestée en justice, s’il s’avère qu’elle est incohérente avec les dispositions intéressées du SDAGE. Le SDAGE peut préciser les règles de gestion de l’eau à l’échelle du bassin hydrographique qui le concerne ; mais il lui est impossible de créer ou de modifier les procédures administratives existantes au niveau national (ajout de pièces aux dossiers d’autorisation, modification de seuils administratifs, etc.).

Les SDAGE sont bâtis autour des questions importantes, qui constituent les chapitres du document. Ces questions répondent aux grands enjeux définis lors de l’état des lieux de 2004, soumis à la consultation de 2005. Par exemple, en Seine-Normandie, la question importante «Diminuer les pollutions diffuses des milieux aquatiques» répond à l’enjeu « Protéger la santé et l’environnement – Améliorer la qualité de l’eau et des milieux aquatiques ». Ces questions importantes sont ensuite déclinées en orientations fondamentales, qui traduisent des grands principes d’action. Dans notre précédent exemple, « Diminuer la pression polluante par les fertilisants (nitrates et phosphore) en élevant le niveau d’application des bonnes pratiques agricoles » est une des orientations fondamentales. Les orientations sont elles-mêmes déclinées en dispositions qui précisent les règles à respecter, les objectifs à atteindre, ou les conditions à remplir pour certains types de projet. Toujours dans notre exemple, une des dispositions proposées sont « Réduire la fertilisation dans les zones vulnérables pour atteindre le bon état chimique des eaux ».

Les SDAGE doivent également contenir les objectifs environnementaux fixés sur chaque masse d’eau, qui correspondent à la date à laquelle elles atteindront le bon état, ou le bon potentiel, ainsi que la justification des éventuels reports de délais ou dérogations d’objectifs. Les principales actions des pouvoirs publics destinées à atteindre ces objectifs sont rassemblées dans un programme de mesures, qui accompagne ainsi le SDAGE et facilite son application. C’est sur l’atteinte ou non de ces objectifs dans le calendrier choisi que l’action de l’Etat français sera appréciée par la Commission Européenne.

Enfin, les SDAGE intègrent un résumé des principaux documents préparatoires ayant contribué à son élaboration : analyse économique, note justificative sur les projets dérogeant au principe de non dégradation, carte des réservoirs biologiques12, des cours d’eau à migrateurs, etc. Les SDAGE sont élaborés par les Comités de bassin, sortes de « parlements de l’eau » à l’échelle de chacun des six bassins, rassemblant élus, usagers et représentants de l’Etat. Les projets de SDAGE approuvés fin 2007 par le Comité de bassin sont soumis à la consultation du public entre le 15 avril et le 15 octobre 2008, puis à la consultation des assemblées début 2009. Le projet final de SDAGE a vocation à intégrer les modifications nécessaires suite aux résultats de ces diverses consultations. Les SDAGE seront définitivement adoptés par le Comité de bassin courant 2009, puis approuvés formellement par le préfet coordonnateur de bassin avant décembre 2009, pour une mise en application immédiate entre le 1er janvier 2010 et le 31 décembre 2015, date à laquelle un nouveau SDAGE devra avoir été élaboré et approuvé.

Les SDAGE et les programmes de mesures : échéances 2015, 2021 ou 2027 pour un bon état des eaux ?

La DCE prévoit la réalisation d’un programme de mesures et d’un plan de gestion. Dans ces documents doivent être définies les orientations permettant de respecter les objectifs environnementaux, et en particulier l’atteinte du bon état en 2015. En France, les Schémas Directeurs d’Aménagement et de Gestion des Eaux sont l’équivalent des plans de gestion institués par la DCE, et ont été révisés en 2007. Ainsi, les grands enjeux ont été déclinés en orientations dans les SDAGE, décrivant ainsi les organisations et dispositifs de gestion à mettre en place pour atteindre en 2015 le bon état des eaux et dans quels délais (2015, 2021 ou 2027).

Financement des Agences de l'Eau : La réforme des Redevances

En ce qui concerne la réforme des redevances, la loi sur l'eau et les milieux aquatiques a défini précisément la nature fiscale des redevances des agences de l'eau et en a réformé l'économie. Les agences ont mis en œuvre sans accident le système nouveau, qui est bien rodé depuis la fin de 2009, pour peu que les systèmes informatiques soient adaptés. Le principe pollueur-payeur reste dans la loi l'un des fondements des redevances. Or, on observe généralement que les taux appliqués restent loin des plafonds votés par le parlement, singulièrement en Adour-Garonne et pour l'irrigation. Ainsi, si les redevances appliquées suffisent pour financer les neuvièmes programmes [2010-2015], beaucoup reste à faire pour qu'elles contribuent à modifier les comportements des agents économiques, notamment en agriculture.


Une évolution rapide de la législation

La législation autour du secteur de l’eau est en évolution permanente. Voici les dernières en date :

Circulaire du 3 janvier 2011 :

Une circulaire relative à l’articulation entre les différents intervenants qui mettent en œuvre les réseaux de surveillance de l’état quantitatif des eaux souterraines. Ce système doit être mis en place pour 2027. Il serait intéressant de prendre en compte dans le SI cette mesure.

Décret du 16 février :

Un décret publié le 16 février modifie une disposition du code de l'environnement qui prévoyait de mettre fin à la possibilité de recourir aux autorisations temporaires de prélèvement en eau dans les Zones de Répartition des Eaux (ZRE) au-delà du 31 décembre 2010.

La loi sur l'eau et les milieux aquatiques (LEMA) de 2006 prévoyait de mettre fin, le 31 décembre 2010, aux dérogations délivrées pour l'irrigation agricole dans ces zones en déficit d’eau. Elle a introduit également de nouveaux outils de gestion, tels que les organismes uniques de gestion collective destinés à répartir, entre irrigants d'un périmètre hydrologique homogène, une ressource en eau limitée, à l'issue d'une seule et unique procédure d'autorisation.

Mais la mise en place de ces structures a pris du retard, le gouvernement a donc décidé de prolonger les dérogations individuelles d'un an, jusqu'au 31 décembre 2011. Pour les zones de répartition des eaux les plus récentes, c'est-à-dire créées après 2009, le report de l'échéance court jusqu'au 31 décembre 2014.

Décret n° 2011-19

Un décret du 21 février 2011 fixant la liste des représentants de l'Etat et de ses établissements publics aux comités de bassin a été établie. A titre d’exemple : une liste détaillée selon les bassins versant par exemple pour le bassin Rhône-Méditerranée :

Comité de bassin Rhône-Méditerranée :

• Le préfet de la région Rhône-Alpes, préfet coordonnateur de bassin, ou son représentant, et les préfets des régions Bourgogne, Franche-Comté, Languedoc-Roussillon et Provence-Alpes-Côte d'Azur, ou leur représentant ;

• Les préfets des départements de la Haute-Marne et des Vosges, ou leur représentant ;

• Le préfet maritime pour la Méditerranée, ou son représentant.

• Le directeur régional de l'environnement, de l'aménagement et du logement de Rhône-Alpes, délégué de bassin, ou son représentant, l'adjoint au délégué de bassin Rhône-Alpes, ou son représentant, et les directeurs régionaux de l'environnement, de l'aménagement et du logement de Bourgogne, de Franche-Comté, de Languedoc-Roussillon et de Provence-Alpes-Côte d'Azur, ou leur représentant ;

• Le commissaire à l'aménagement des Alpes et le commissaire à l'aménagement du Massif central, ou leur représentant ;

• Les directeurs régionaux de l'alimentation, de l'agriculture et de la forêt de Rhône-Alpes et de Languedoc-Roussillon, ou leur représentant ;

• Le secrétaire général pour les affaires régionales de Rhône-Alpes, ou son représentant ;

• Le directeur régional des finances publiques de Rhône-Alpes et du département du Rhône, ou son représentant ;

• Le directeur régional des entreprises, de la concurrence, de la consommation, du travail et de l'emploi de Rhône-Alpes, ou son représentant ;

• Le directeur interrégional de la mer Méditerranée, ou son représentant ;

• Le directeur régional de la jeunesse, des sports et de la cohésion sociale de Rhône-Alpes, ou son représentant.

Etablissements publics de l’Etat concernés :

• Le directeur général délégué du BRGM, ou son représentant ;

• Le directeur général de Voies navigables de France (VNF), ou son représentant ;

• Le directeur général de l'Institut Français de Recherche pour l'Exploitation de la Mer IFREMER), ou son Représentant ;

• Le directeur général de l'Institut de recherche pour l'ingénierie de l'agriculture et de L’environnement (CEMAGREF), ou son représentant ;

• Le directeur du Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, ou son représentant ;

• Le directeur de l'Agence régionale de santé de Rhône-Alpes (ARS), ou son représentant ;

• Le directeur de l'Agence des aires marines protégées (AAMP), ou son représentant ;

• Le directeur général de l'Office national de l'eau et des milieux aquatiques (ONEMA), ou son représentant ;

• Le directeur du parc national de Port-Cros, ou son représentant, et le directeur du grand port maritime de Marseille, ou son représentant.


Un contrôle de l’Etat impossible

Malgré l’évolution rapide des lois à propos du secteur de l’eau, l’Etat ne dispose pas actuellement des moyens techniques et humains pour contrôler les entreprises et acteurs intervenant dans le secteur

Il faudra peut-être une bonne volonté politique de l’Etat pour assurer cette mission dans le secteur de l’eau. Les textes de loi ne suffisent pas, les lois doivent être strictement respectées pour atteindre les prochains objectifs de la DCE.

A ce propos, il est important de rappeler qu’il est alors très difficile à l’Etat actuel de valider le respect des objectifs.