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Le monde de l'eau, ses acteurs, son marche, son économie

Présente partout, dans nos robinets, dans les rayons de nos supermarchés, l’eau paraît inépuisable. Mais la pollution et les changements climatiques ont fait de ce bien universel une ressource de plus en plus rare. Il faut donc l’entretenir et bien la gérer. Mais la gestion de l’eau est bien plus compliquée qu’il n’y paraît. Certains voudraient une gestion publique, confiée aux collectivités alors que d’autres, souhaitent une gestion privée, confiée à des prestataires de service privées. Entre gestion privée et gestion publique, le débat reste encore ouvert.

GoutteEau (Source: patricemars.blogspot)

Les facteurs qui poussent un gouvernement à investir dans la recherche et les technologies de l’eau

L’eau, une ressource universelle

L’eau comme bien marchand, la privatisation

L’eau est une ressource naturelle, non fabriquée par l’homme. Cependant, son pompage, son traitement, son transport et sa distribution vers les robinets de particuliers a un coût : il nécessite des infrastructures, des investissements, des compétences, des frais de fonctionnement et de maintenance.

L’eau et ses services ont donc un prix. C’est d’ailleurs la raison pour laquelle on parle de marchandise voire même de bien marchand « pas comme les autres » d’après le premier considérant de la Directive Cadre : « L'eau n'est pas un bien marchand comme les autres mais un patrimoine qu'il faut protéger, défendre et traiter comme tel. ».

En effet, dans les villes, chacun peut se servir de l’eau potable gratuitement aux fontaines et, dans les campagnes, chacun peut puiser l’eau des rivières pour sa consommation personnelle. De ce fait, l’eau est différente des autres marchandises. En droit français, l’eau potable profite aussi d’un régime spécial puisque la loi instaure le droit à un prix abordable et le droit à une aide pour la payer. Il interdit même l’arrêt de fournir de l’eau à des usagers qui sont incapables de la payer. Tous les Etats de l’Union Européenne ont adopté des dispositions particulières pour faciliter l’accès à l’eau potable. Le Conseil des Ministres de l’Union Européenne a même déclaré le 22 mars 2010 que l’accès à l’eau faisait partie intégrante du droit à un niveau de vie suffisant, droit que tous les Etats de l’Union sont tenus de mettre en œuvre du fait du Pacte international relatif aux droits économiques, sociaux et culturels qu’ils ont tous ratifié. Henri Smets, Membre de l’Académie de l’Eau, ajoute : « si l’accès à l’eau est devenu un droit, c’est parce que l’eau n’est pas un bien comme les autres ».

Paradoxalement, la Commission de Bruxelles veut faire de cette richesse universelle un bien marchand comme les autres. En France c’est déjà le cas à travers le Partenariat Public-Privé (PPP). Le PPP est un mode de financement par lequel une autorité publique fait appel à des prestataires privés pour financer et gérer un équipement assurant ou contribuant au service publique. Veolia et Suez, les leaders de la gestion des ressources en eau, souhaitent exporter ce système mais cela ne plaît pas à tout le monde. La mobilisation populaire au Kenya ou en Amérique centrale, notamment la Bolivie, a contraint les deux multinationales à se retirer.

De plus en plus la privatisation de la gestion de l’eau est remise en cause. A Viry-Châtillon, le conseiller municipale a même mis en place depuis le 1er janvier 2011 une régie publique de distribution d’eau sur sa commune. Ce dispositif lui a permis d’économiser 25 à 30 % de frais excédentaires des entreprises privées, délégataires de services publics, et ainsi de mettre en place des tarifs sociaux.

Pour rappel, en France, la distribution de l’eau est de la compétence des communes. Les communes peuvent déléguer la gestion de l’eau à des structures intercommunales. Chaque commune ou structure intercommunale peut choisir son mode de gestion des installations et des réseaux d’eau potable. Soit la régie directe, dans laquelle la collectivité locale gère directement le service dans un cadre de réglementation publique, soit la gestion déléguée à des prestataires de service privés.

Le manque de transparence

L’eau est un bien commun qui ne devrait pas avoir de prix mais le constat est clair : nous la payons de plus en plus cher.

En effet, le coût de l’eau explose depuis les années 1970. Rien que depuis 1990, il a quasiment été multiplié par trois, reflétant le coût de plus en plus élevé des traitements.

Evolution du prix de l'eau en France (source:INSEE)

L’association de consommateurs rappelle même que le service de l'eau en France génère quatre milliards de mètre cube d'eau potable délivrés chaque année et une facture globale de douze milliards d'euros.

L’acheminement de l’eau est un service géré par les communes. Le problème est qu’aucune structure centralisée et publique ne recense les informations sur les coûts. Il est impossible alors de savoir si l’eau est plus chère dans telle ou telle commune et il n’est pas facile d’évaluer correctement les compétences de la régie responsable du service public de l’eau.

Depuis, un Observatoire National de l’Eau a été mis en place. Son rôle, définit par le gouvernement en 2009, est de créer une fiche d’identité des services de l’eau pour chaque territoire. Des informations comme le volume des fuites, le prix des services ou la qualité de l’assainissement pourra être trouvées. L’observatoire est chargé de collecter quarante points de données par commune en les demandant aux maires. Pourtant, deux ans après sa création, seules 3 % des communes (représentant 30 % de la population) ont fourni ces données. Les informations sont parfois entre les mains des délégataires du service public de l’eau (Suez, Veolia, etc.), qui refusent de les transmettre. Certains maires agriculteurs peuvent aussi refuser de communiquer les données sur la qualité d’une eau qu’ils savent polluée.

Opération Transparence (source: www.prixdeleau.fr)

Pour contourner ces obstacles, la Fondation France Libertés et 60 Millions de Consommateurs, ont lancé l’Opération Transparence. L'objectif de cette opération est de « faire progresser la transparence sur le prix et la qualité du service public de l'eau ». Il s'agit de savoir combien coûte l'eau, commune par commune, quels services se cachent derrière ce prix, qui gère l'eau et d'accroître la base de données des services de l'eau en France, lancée en 2008 par l'Office National de l'Eau et des Milieux Aquatiques (ONEMA). Le but de l'enquête est donc d’inciter les mairies à alimenter la base de données.


Pollution et changement climatique

La pollution des ressources en eau peut avoir des origines domestiques et urbaines, industrielles ou agricoles, mais peut aussi être « naturelle ».

Les pollutions domestiques et urbaines sont constituées des eaux « ménagères » (eaux de cuisine et de salle de bains) et des eaux de « vannes » (WC). A cela, il faut ajouter les eaux usées rejetées (effluents) par les installations collectives, telles que les hôpitaux, les écoles, les commerces, les hôtels et restaurants, etc.

La pollution industrielle est composée de rejets industriels. Parmi les industries considérées comme rejetant des matières particulièrement polluantes pour l’eau, on citera notamment, les industries agro-alimentaires, la chimie et les traitements de surface.

La pollution d’origine agricole a un rapport avec les cultures et l’élevage. Les causes des différentes formes de pollution agricole sont multiples : les engrais, les pesticides (herbicides, fongicides et insecticides), les déjections animales qui accompagnent les élevages intensifs et les résidus d’antibiotiques utilisés contre les infections animales ou pour favoriser leur croissance.

La pollution naturelle provient des phénomènes naturels. Par exemple, le contact de l’eau avec des gisements minéraux peut, par érosion ou dissolution, engendrer des concentrations inhabituelles en métaux lourds, en arsenic, etc.

Les effets de ces différentes pollutions sont multiples. Outre les conséquences écologiques évidentes menaçant les systèmes aquatiques et les conséquences sur la santé humaine notamment en ingérant de l’eau contaminée, on peut constater des conséquences économiques et politiques.

Au niveau économique, la pollution de l’eau implique dans la ville une réduction des ressources utilisables, l’augmentation du coût des traitements et des transports, et freinent le développement industriel très exigeant en terme de quantité et de qualité de l’eau.

Au niveau politique, la France et une grande partie des pays développés établissent en conséquence de la pollution, des mesures très strictes pour la qualité sanitaire de l’eau.

Par exemple aux Etats-Unis, l’Agence américaine de Protection de l’Environnement (EPA) surveille activement la qualité des eaux. Ainsi, lorsque du chrome a été trouvé dans les eaux Américaines, l’EPA a réagi instantanément en envoyant un ordre aux collectivités locales pour surveiller le niveau du chrome.

Au Canada, la ville de Repentigny s’engage dans une vaste opération métropolitaine qui vise à la réduction de contaminants provenant des entreprises industrielles, commerciales et institutionnelles.

En plus de la pollution, les changements climatiques devraient avoir un effet néfaste sur l’eau. D’après, un rapport publié par la Commission Européenne sur les avancées réalisées par les Etats membres dans leur lutte contre la raréfaction de l’eau et la sécheresse, il est ressorti qu’en 2009 et 2010, une grande partie du sud de l’Europe a connu une raréfaction de l’eau en raison de ressources hydriques restreintes, auxquelles s’ajoutent une demande élevée et une diminution des précipitations. La République tchèque, Chypre et Malte ont déclaré devoir constamment faire face à ce problème. Cinq Etats membres (l’Espagne, la France, la Hongrie, le Portugal et le Royaume-Uni) ont signalé des sécheresses et des niveaux pluviométriques inférieurs à la moyenne à long terme, et quatre Etats membres (la France, les Pays-Bas, la Roumanie et la Suède) ont dû faire face à des pénuries d’eau ponctuelles à certains endroits.

Des études récentes ont montré que d’ici 2050, la plupart des régions européennes devraient être confrontées à un stress hydrique modéré ou sévère, dû en grande partie à une exploitation non durable de l’eau et intensifié par les effets du changement climatique. Les Etats membres concernés ont pris des mesures pour réduire la consommation en eau.


Amélioration de la qualité, directive CADRE

La Directive Cadre Européenne impose aux Etats membres de protéger et de restaurer toutes les masses d’eaux souterraines et de surface (rivières, lacs, canaux et eaux côtières) pour atteindre « un bon état » des eaux d’ici 2015. Autrement dit, les eaux doivent comporter le moins de traces possibles d’impact des activités humaines.

Pour parvenir à évaluer les eaux et les milieux aquatiques d’un bassin, une typologie a été mise en place : les masses d’eau. Une masse d’eau est une portion d’un cours d’eau, d’un lac ou d’une zone côtière relativement homogène du point de vue de la géologie, de la morphologie, du régime hydrologique, de la topographie et de la salinité. Elles correspondent par exemple à un tronçon de cours d’eau ou un plan d’eau. Les masses d’eau sont regroupées en types cohérents dont les caractéristiques sont similaires. Ainsi, la Directive Cadre vise à instaurer une unité d’évaluation pertinente à l’échelle européenne, afin de pouvoir comparer des milieux aquatiques comparables (par exemple, une rivière « alpine » : bavaroise, autrichienne ou française).

Ces masses d’eau servent de base à la définition du « bon état ». En effet, pour qualifier l’état des eaux, une distinction a été établie entre:

  • Les masses d’eau naturelles de surface (rivières, lacs, étangs, eaux littorales et estuariennes) pour lesquelles sont fixés à la fois un objectif de bon état écologique et un objectif de bon état chimique ;
  • Les masses d’eau souterraines pour lesquelles sont fixés à la fois un objectif de bon état quantitatif et un objectif de bon état chimique.

Les pays européens font beaucoup d’efforts pour atteindre cet objectif et répondre aux exigences imposées par la Directive. Etant donné la typologie précédente, le directeur de l’agence de protection de l’environnement a déclaré : « En comparaison avec d'autres Etats membres de l'Union Européenne, l'Irlande a une meilleure qualité de l'eau que la moyenne. Bien qu'il y ait des preuves d'une amélioration globale de la qualité de l'eau en Irlande, d'autres mesures sont essentielles si nous voulons atteindre nos objectifs de qualité de l'eau pour 2015 et 2021 comme requis par la Directive Cadre. ».

De plus, la qualité des eaux de baignade en Irlande reste élevée. 97 % de ces zones répondent aux normes obligatoires de l'Union Européenne, et sont classées comme étant de qualité "suffisante".

La Directive impose également aux Etats membres de publier un plan de gestion pour chaque bassin hydrographique, au plus tard neuf ans après que la Directive soit entrée en vigueur. Ces plans sont essentiels pour mettre en œuvre l'objectif que s'est fixé l'Union Européenne d’atteindre un « bon état » des eaux européennes d'ici à 2015 et tout retard peut empêcher de parvenir à la qualité des eaux requises.

Le 6 avril dernier, la Commission européenne a saisi la Cour de justice pour non respect de la législation de l’Union Européenne sur l’eau. Bien que les travaux aient commencé en Belgique, au Danemark, en Grèce et au Portugal, ces quatre Etats membres n’ont pas encore adopté et publié leurs plans de gestion des bassins hydrographiques.

En Belgique, la région Bruxelles-Capitale et la Région wallonne n'ont commencé des consultations publiques qu’en 2011 et prévoient de publier leurs plans en 2011 et 2012, respectivement. Le Danemark a pour objectif de publier ses plans en septembre 2011, après la fin des consultations publiques en avril 2011. La Grèce n'a pas encore commencé des consultations publiques et ne publiera pas ses plans d’ici mars 2012. Le Portugal devrait entamer des consultations publiques en 2011, mais ne sait pas encore quand les plans pourraient être adoptés.


Création d’emplois, aide aux agriculteurs et économie

Pour garantir une bonne gestion de l’eau, des investissements sont nécessaires. En Europe, les Etats membres investissent de plus en plus pour répondre aux exigences de la Directive Cadre sur l’Eau. Dans les autres pays développés, les investissements dans le secteur de l’eau passe par des plans.

Aux Etats-Unis et en Chine, la gestion de l'eau est intégrée dans leurs plans de relance. Aux Etats-Unis, l'association Alliance for Water Efficiency estime que chaque million de dollars investi dans ce domaine entraîne la création de 15 à 22 emplois, un gain de production de 2,5 à 2,8 millions de dollars et un gain de PIB de 1,3 à 1,5 million de dollars.

Au Canada, un plan d’action économique a été lancé en 2009 pour permettre à l’économie de se rétablir de la plus grave récession mondiale depuis les années 1930 et appuyer la croissance économique ainsi que la création d’emplois. Depuis la mise en place du plan, 11 millions de dollars ont été investis pour des projets d'amélioration du traitement des eaux usées à Winnipeg, permettant d'améliorer la qualité de l'eau de la rivière Rouge et du lac Winnipeg. Un investissement de 234 millions de dollars a été nécessaire pour huit projets de traitement des eaux usées en Ontario afin d'améliorer la qualité de l'eau, plus particulièrement dans le bassin des Grands Lacs et 191 millions de dollars ont été investis dans 23 projets d'approvisionnement en eau et de traitement des eaux usées. On remarquera ainsi que le Canada s’implique énormément dans le domaine de l’eau. Ceci paraît normal étant donné qu’elle possède de nombreuses et vastes ressources en eau.

Le plan d'action économique aide également les agriculteurs à améliorer leurs pratiques de gestion de l’eau en mettant l'accent sur le renforcement de l'économie et la création d'emplois. Le ministre de l’agriculture, M. Ritz a déclaré : « Le nouveau gouvernement du Canada travaille avec les familles agricoles pour s'assurer qu'elles ont accès à l'eau propre dont elles ont besoin tout en maintenant un environnement sain ».

Le gouvernement investirait près d’un million de dollars dans le nouveau projet du bassin hydrographique de la rivière Souris, établi dans le cadre de la phase 2 du projet d'Evaluation des Pratiques de gestion Bénéfiques à l'échelle des Bassins Hydrographiques (EPBH). Par l'intermédiaire du plan d'action économique, le gouvernement canadien investi dans des pratiques agricoles durables donnant des résultats à l'échelle locale et à l'échelle mondiale.

En plus du plan d’action économique, l’Ontario a lancé un plan quinquennal intitulé « Ontario ouvert sur le monde » dont les objectifs sont de renforcer l’économie et de créer plus d’emplois. L’un de leur programme concerne les technologies de l’eau. D’après M. McGuinty, premier ministre de l’Ontario, « La loi sur le développement des technologies de l'eau entraînerait la création de nouveaux emplois en Ontario et ferait de notre province le chef de file nord-américain en matière de développement et de vente de nouvelles technologies et de nouveaux services pour la conservation et le traitement de l'eau. Déjà, l'Ontario commence à offrir des solutions : de la conservation de l'eau à la nanotechnologie, les sociétés ontariennes montrent le chemin, tout en procurant de bons emplois bien rémunérés dans la province à 22 000 personnes qui vendent des technologies de l'eau partout au monde. ».

L’importance de l’eau pour l’agriculture et donc pour l’alimentation des populations n’est plus à démontrer. L’eau agricole apparait donc comme l’un des leviers majeurs de développement dans les économies en développement. Ainsi, l’Office International de l’eau (OIEau) offre son appui aux pays en développement pour mettre en place les réformes institutionnelles et législatives donnant un cadre pour la gestion de l’eau pour l’agriculture et pour la réalisation des investissements nécessaires au secteur de l’eau en agriculture et pour accroître l’efficacité de l’eau dans le processus de production agricole. L’intervention de l’Office International de l’eau peut s’opérer soit à l’échelle du pays (réformes institutionnelles et législatives, stratégie nationale) soit au niveau local, à l’échelle d’un bassin ou d’une région.


Partage des ressources

L'eau, sujet de discorde

Le partage d’une même ressource n’est pas évident. Surtout dans les pays pauvres où les tensions sont omniprésentes. Parmi ces ressources, on peut citer le bassin de l’Indus, menacé par la rivalité entre le Pakistan et l'Inde. Ce qu’il faut savoir est que l’indicateur de développement humain dans cette région est catastrophique et qu’elle abrite des centaines de millions de personnes sans accès suffisant à l’eau potable. De plus, la croissance démographique sans précédent, la mauvaise gestion de l’eau, les changements climatiques et la pollution n’ont fait qu’alimenter les tensions entre le Pakistan et l’Inde.

Pour remédier à cette crise, les Nations Unies ont recommandé une approche intégrée par bassin, c’est-à-dire en tenant compte des limites d’un bassin versant et en considérant l’ensemble des activités qui peuvent avoir un impact sur l’eau et les écosystèmes aquatiques à l’intérieur des limites d’un bassin versant. L’Europe sert d’exemple avec la Directive Cadre. Selon les Nations Unies : « L'Union Européenne utilise cette approche pour la gestion de l'eau avec succès depuis l'adoption de la Directive Cadre Européenne sur l'eau. La situation des ressources européennes en eau est relativement favorable par rapport aux autres régions du monde. » L’Histoire et le contexte de la rivalité entre les différents pays et régions à travers le monde suggèrent que l'approche par bassin est une solution de partage des eaux viable entre les états.

Au Moyen-Orient, la pénurie d’eau est source de discorde. En effet, dans cette partie du monde, la répartition inégale de l’eau crée des conflits. Sur la base d’une large consultation des pays concernés, un groupe d’experts indépendants indiens, le Strategic Forsight Group (SFG), a réalisé un rapport qui dresse un tableau inquiétant des conséquences multiples de ce manque d’eau au Moyen-Orient. Ce document de 150 pages, commandité par la Suisse et la Suède, évalue les défis liés à la gestion transfrontalière des ressources hydriques mises sous pression par l'accroissement démographique, les migrations, l'urbanisation et le changement climatique. Il dresse également une liste de dix recommandations, comme la création d’un Conseil de coopération pour les ressources en eau réunissant dans un premier temps l'Iraq, la Jordanie, le Liban, la Syrie et la Turquie. La Suisse souhaite réellement que la gestion de l’eau devienne un facteur de paix. «Aujourd'hui facteur de divisions et de tensions, l'eau peut devenir un instrument de paix et de coopération: telle est la thèse centrale du rapport», souligne le ministère suisse des Affaires étrangères (DFAE) dirigé par Micheline Calmy-Rey.

Nous pouvons également mettre en évidence la dépendance entre pays riches et pays pauvres dans le domaine de l’eau. On peut citer le Chili, deuxième réserve mondiale d’eau douce dont la majorité des rivières de la Patagonie appartiennent à des entreprises étrangères telles que l’espagnole Endesa, la suisse Xstrata ou l’américaine Aes Gener. Leur propriété sur l’eau a été accordée grâce à la loi chilienne sur l’eau, mise en place sous Pinochet. De ce fait, le Chili n’est plus maître de ses eaux.

L'eau, sujet d'entente

On constate de nombreuses coopérations dans la gestion et les technologies de l’eau, en particulier avec les pays européens.

En France, le Grand Lyon a développé des coopérations décentralisées qui sont une aide apportée par une ville à une autre, pour contribuer à son développement économique et culturel. Le Grand Lyon s’est ainsi engagé à participer au financement d’infrastructures permettant un meilleur accès à l’eau et à l’assainissement pour les populations les plus défavorisées des pays en développement, via la création d’un Fonds de solidarité internationale pour l’eau. Mais aussi de renforcer les capacités de collectivités responsables de la distribution d’eau potable et de la collecte des eaux usées dans les pays du Sud, via la mise en œuvre de programmes de coopération décentralisée. Il faut savoir que le Fonds a déjà financé des projets à Madagascar, la Moldavie, le Burkina Faso et le Maroc. A propos de ce dernier, on peut noter qu’un accord de coopération entre le Syndicat des Eaux d'Ile De France (SEDIF) et la ville de Rabat dans le domaine de la gestion de l’eau a été signé le 3 mars 2011.

De même, l’Allemagne, bien avancé dans le domaine de l’eau, est très demandée. Une coopération scientifique s’est développée entre l’Université Sidi Mohamed Ben Abdellah de Fès et les Allemands à travers la Fondation Alexander Von Humboldt. Le président de l’université explique : « Les Allemands sont très dynamiques en matière d'appui, notamment financier, à la recherche scientifique. Et le partenariat avec ce pays, locomotive du développement en l'Europe, à travers la Fondation Alexander Humboldt ne peut que renforcer la stratégie de valorisation de la recherche menée au sein l'Université et de ses différents pôles, à savoir l'environnement, la gestion de l'eau et le développement durable, les plantes aromatiques et médicinales, le management des risques naturels et le dialogue interculturel ». Il a ajouté qu'actuellement les moyens financiers aussi bien nationaux qu'internationaux ne manquaient pas pour développer la recherche et que les chercheurs marocains n'avaient rien à envier aux chercheurs étrangers et qu'ils devaient profiter de ce contexte pour développer et valoriser leurs travaux scientifiques au Maroc.

Une coopération avec le Vietnam est également d’actualité. Le représentant du German Water Partnership (GWP), a déclaré que son organisation transférerait intégralement ses technologies de traitement et de gestion de l'eau au Vietnam, et plus particulièrement les technologies applicables en tant que solution au changement climatique, à la croissance démographique et à la désertification. Le représentant du ministère des Sciences et des technologies du Vietnam, a quant à lui annoncé que plusieurs projets allemands en la matière étaient en œuvre dans des villes telles que Nam Dinh, Hanoi ou Can Tho et que compte tenu de leur efficacité, son pays souhaitait poursuivre la coopération, le transfert de technologies et la recherche dans le traitement de l'eau et l'environnement.

Le Canada, acteur très investi dans le secteur de l’eau, est également au cœur de collaborations. Depuis peu, l'Ontario est devenue le premier gouvernement nord-américain à signer une entente sur les technologies de l'eau propre avec Singapour. La province canadienne et la république chinoise partagent l’objectif de devenir des plaques tournantes des technologies de l’eau propre. L’agence nationale de l'eau de Singapour, connue sous le nom de PUB, et l'Ontario collaboreront dans les domaines de la recherche et du développement, et de l'échange des connaissances et du savoir-faire qui valorisent les ressources de chaque compétence. Cette entente montre une volonté de la part de Singapour et de l'Ontario à mettre au point des solutions à long terme pour le traitement, la gestion et la conservation de l'eau propre à l'échelle locale et internationale.


Une meilleure gestion de l’eau

Le monde prend de plus en plus conscience qu’il faut préserver l’eau. C’est pourquoi l’Europe a adopté la Directive Cadre sur l’Eau en 2000 et la Chine a pris en compte cet enjeu dans son 11ème Plan Quinquennal. Le vice ministre chinois des ressources hydrauliques, Zhou Ying, a même déclaré : « La Chine demeure la face de l’industrialisation. La pénurie d’eau est un goulot d’étranglement pour le développement. C’est pourquoi nous allons travailler à harmoniser la production propre, les économies d’eau et intégrer la gestion sociale et économique de l’eau dans notre développement durable ».

Au Moyen-Orient, la gestion de l’eau est confiée à des entreprises étrangères privées telles que Veolia et Suez pour garantir une meilleure gestion de l’eau. En début d’année, Veolia Eau a remporté le contrat de cogestion des services d’eau du Sultanat d’Oman. Les autorités du Sultanat ont d’ailleurs affirmé leur volonté de développer, d'améliorer et de renforcer les capacités et la qualité des infrastructures d'eau du pays.

Autre contrat, pendant la journée mondiale de l’eau (le 22 mars 2011), le ministre algérien des Ressources en eau, Abdelmalek Sellal, a déclaré que le français Suez bénéficiera d’un nouveau contrat pour la gestion déléguée de l’eau d’Alger. Il a en effet été satisfait par le groupe français qui a aidé à l’amélioration du niveau de l’alimentation en eau dans le grand Alger.

Au Canada, reconnue comme un bien collectif, l’eau est devenue un enjeu de société. Nous avons déjà pu le constater avec le plan d’action économique lancé en 2009. Déjà très investi dans ce domaine, le Réseau Environnement, secteur Bas-Saint-Laurent–Gaspésie–Îles-de-la-Madeleine a réuni quelques spécialistes à Matane (ville du Québec) en février dernier pour réfléchir sur une gestion efficace de cette ressource.

Malgré toutes les innovations, il en est ressorti qu’il restait encore beaucoup de travail à effectuer pour assurer une gestion efficace. Même s’il se fait déjà beaucoup de travail en matière de gestion de l’eau et que les technologies se raffinent, Doris Dumas (coordinatrice en environnement durable de la ville de Matane) note l’apparition de nouvelles problématiques, dont certaines liées aux changements climatiques.

Quant aux Etats-Unis, ils ne sont pas en reste puisqu’ils ont le projet de faire de la région de Milwaukee la « Sillicon Valley » de l’eau en créant un centre de recherche et développement mondial. Cette région possède les qualités requises pour accueillir ce projet. En effet, au niveau académique, le Milwaukee possède le plus gros centre de recherche sur l’eau douce dans la région des Grands Lacs. Au niveau économique, la région a créé le « Milwaukee Water Council », organisme en charge du développement d’un cluster régional comprenant environ 120 entreprises. De plus, ce développement de la région a entrainé l’implantation de nombreux centres de recherche et développement, ainsi que de nombreux partenariats. Ainsi Veolia Water a mis en place un laboratoire de travail avec le « Milwauke Metroplotan Sewage District », afin de soutenir la recherche et développement et des programmes de transfert technologique.

 

source de la première image: http://patricemars.blogspot.com/

source de la deuxième image: http://www.planetebleue.info/

source de la troisième image: www.prixdeleau.fr